mardi 8 septembre 2020

L'inconséquence d'un ministère...

Rentrée bizarre, rentrée apeurée, rentrée masquée, rentrée en quarantaine... C'est certainement la rentrée la plus étonnante que vous ayez préparée et vécue, avec son cortège de précautions, de difficultés, de craintes. Vous avez dû imaginer des fonctionnements, des déplacements, des accueils différents. En quelque sorte vous avez fait votre travail de Directrice ou Directeur, ce qui certes peut être valorisant quand vous vous dîtes "ça fonctionne !", mais aussi prend votre temps et votre énergie alors que rien n'a changé de vos tâches habituelles, quand elles n'ont pas empiré.

Qu'est-ce que je suis content d'avoir eu le nez de prendre ma retraite un an plus tôt que prévu ! Certes j'ai une décote mais je n'ai pas ce genre de chose à vivre, le confinement/déconfinement a largement suffi au petit Directeur que j'étais... Je veux vous assurer que je n'en suis pas encore suffisamment éloigné pour ne pas me mettre à votre place. Et je compatis à vos doutes, vos interrogations, votre frustration même si après à peine quelques jours vous vous êtes retrouvé avec une ou plusieurs classes en "quatorzaine".

J'en profite pour vous rappeler que le groupe Facebook du GDiD est fait pour vous soutenir et vous aider. Beaucoup de collègues connaissent les mêmes problèmes que vous, connaissent les mêmes difficultés, parfois les mêmes souffrances. Ne restez pas seule, ne restez pas seul, venez partager vos doutes et vos interrogations. Vous y trouverez beaucoup de réponses et certainement aussi pas mal de réconfort.

Mais pour l'instant je suis effaré de l'inconséquence de notre ministère. Nous avons tous constaté son absence entre mars et juillet, mais son inexistence en cette rentrée me fascine. Comment en deux mois de juillet et août n'a-t-il pas pu se poser les questions:

  1. de la durée de la quarantaine. Qu'elle soit aujourd'hui éventuellement réduite à une semaine n'est-il pas un peu tard ?
  2. de l'usage des masques selon le niveau. J'entends parler de masques en élémentaire, en CM voire plus tôt... N'est-ce pas un peu tard ?
  3. de la portée d'un enseignement masqué auprès d'élèves qui ont besoin de voir notre bouche, surtout en maternelle. Comment parler masqué ? Comment faire de la phonologie masqué ?
  4. du confort de l'enseignant qui porte un masque six heures. Est-ce vraiment supportable ?
  5. d'un éventuel travail à distance pour les élèves mis à l'écart. Des mesures et des instructions claires, est-ce trop demander ?
  6. du chômage partiel des parents d'enfants en quarantaine. Un "dispositif" est discrètement évoqué ces jours-ci, n'aurait-il pas été préférable de le mettre en place dès le 1er septembre ?

Il faut croire que les milliers de bureaucrates de ce ministère se fichent complètement de la réalité de la scolarisation. Ils en ignorent tout, ou alors ils tapent la belote. Cela n'en reste pas moins stupéfiant. Et ça laisse dans le caca 45000 Directrices et Directeurs d'école, 300000 enseignants, 35000 communes, et quelques millions de familles... et je ne parle pas du secondaire.

Pour moi cela augure mal des discussions qui s'engagent dès demain mercredi 9 septembre au ministère, et qui concernent notre métier. On les aura attendues, celles-là ! Mais le décès de Christine Renon, le projet de Loi de Mme Rilhac et notre investissement ces derniers mois auront poussé à la roue. Toutes les organisations syndicales seront présentes, le GDiD lui aussi sera représenté en la personne de son Président Alain Rei. Nous avons désormais de nombreux alliés dans la place, et nos adversaires héréditaires eux-mêmes doivent bien convenir que sans nous la machine ne tournerait pas du tout.

Il y aura quatre groupes de travail :

  1. décharges;
  2. délégation de compétences;
  3. rémunération/carrière;
  4. sécurité.

De statut point. De création d'établissements du primaire point. Pour mon militantisme forcené c'est évidemment décevant. Mais tout est bon à prendre tant la situation est catastrophique. Ce n'est certainement pas un hasard si cette année encore 4000 postes de Direction n'étaient pas pourvus. Qui veut encore exercer ce métier où on prend tout dans la gueule sans rien recevoir ?

M. Blanquer veut donc prendre la main et devancer le texte de Loi qui passera au Sénat en octobre. Comme je l'ai déjà expliqué, c'est de bonne guerre. Mais je crains que le soufflé retombe tout aussi vite qu'il est monté. Si certaines mesures d'envergure ne sont pas prises et appliquées immédiatement, je crains que les Directrices et Directeurs d'école de notre pays ne tiennent pas moralement et physiquement le coup. Je ne voudrais pas voir s'effondrer trop de collègues poussés à bout, ni surtout revoir un drame comme celui qui tous nous a bouleversé il y a deux ans maintenant.

Donc je vous demande de veiller prioritairement à votre santé. L'école, les enseignants, les enfants, très bien... Mais vous êtes important aussi, votre rôle est celui de pivot de notre système scolaire. Pensez à vous, pensez à votre famille, soyez attentifs à votre santé physique et intellectuelle. Si ça ne va pas mettez-vous en arrêt sans remord. Et ne prenez pas sur vous toute la misère des insuffisances de l'Etat.

Allez, nous au GDiD il va nous falloir bosser... On y va !


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