lundi 22 mars 2021

Communiqué de Presse commun du 22 mars 2021

 Paris, le 22 mars 2021,

Depuis l’automne dernier, plusieurs syndicats (SE-Unsa, Sgen-CFDT, SNE-Csen) et associations (GDiD, GTRID) se sont concertés pour sortir de l’ornière dans laquelle était englué le dossier de la direction d’école. 

Ces organisations ont mis de côté leurs différences pour mettre en avant leurs convergences, et elles ont travaillé pour produire des propositions concrètes, sur la question prioritaire des seuils de décharge dans un premier temps et en vue de conforter la mission le poste de directeur référent qui se déploie dans les académies.

Nous, SE-Unsa, Sgen-CFDT, SNE, GDiD et GTRID, sommes convenus de poursuivre le travail sur les autres volets de la direction d’école, afin de donner des perspectives aux acteurs de terrain, lassés de devoir attendre encore et toujours une reconnaissance de leur fonction.

Cette reconnaissance qui leur est due ainsi que le temps nécessaire à l’exercice de leurs missions seront de surcroît profitables à l’ensemble des acteurs de l’école : enseignants, élus, parents d’élèves…

Ce lundi 22 mars nos organisations ont été reçues par le directeur de cabinet du ministre. Elles lui ont remis leurs propositions de programmation pluriannuelle de montée en charge des décharges de direction ainsi que la fiche de poste de directeur référent. Pour les directrices et directeurs, cela doit se traduire par une amélioration de leurs conditions matérielles et morales, et rendre leur métier plus attractif. Il est en effet anormal que, faute de candidats, 4 000 à 5 000 adjoints soient contraints chaque année de faire fonction.

En travaillant sur l’être autant que sur l’avoir, un équilibre est possible. Nos organisations le porteront ensemble jusqu’à sa déclinaison en circulaires et notes de services.
 

Stéphane  CROCHET - Secrétaire Général du SE-UNSA     
Catherine NAVE-BEKHTI - Secrétaire Générale du Sgen-CFDT  
Laurent HOEFMAN - Président du SNE                         
Alain REI - Président du GDiD             
Loïc BREILLOUX - Pour le GTRID         



mercredi 17 mars 2021

 Un premier pas qui compte


Le Sénat a conforté notre souhait de création d’un statut spécifique pour la direction d’école, approuvant dans les grandes lignes la loi portée par Cécile Rilhac.
Pour autant, certains amendements s’ils étaient maintenus en l’état risquent de troubler durablement cette avancée fondamentale.
Outre Absence de cadre national contraignant, rupture de l’unité de notre profession, conditions d’emploi liées au bon vouloir du DASEN, disparition annoncée du rêve d’aide administrative, notre métier est comme un malade cardiaque affecté d’un virus reconnu de tous à qui l’on administrerait un médicament encore plus connu et décrié…



L’absence de la référence au concept de hiérarchie était une demande forte que nous avons portée, partagée par plusieurs syndicats et associations. Que les Sénateurs nous aient entendus est un motif de satisfaction et d’encouragement.
Cette suppression est essentielle. Une négation ("Il n’exerce pas d’autorité hiérarchique sur les enseignants de son école") n’est pas de mise dans un texte de Loi, de plus l’interprétation qui aurait pu en être faite risquait d’être délétère. Bien sûr, les opposants à notre métier ne manqueront pas de décrier cette absence, arguant du sens caché de sa suppression. Il est bon alors de se référer à ce qu’est l’autorité fonctionnelle (comme le rappelle très bien l’article du 16 mars 2021 de Dominique Bruneau du SGEN-CFDT *)…
Laissons-les avec leur déni de réalité, et partageons plutôt autour de nous ce que ce premier pas apporte à l’école, non seulement pour les directions, mais aussi et surtout pour le fonctionnement quotidien de l’école et pour l’ensemble des membres de l’équipe enseignante.
Notre statut commence à être intégré dans ce qui sera peut-être une loi fondamentale, et c’est là le plus important. A partir de ce premier pas, tout est possible, enfin !

Pour autant, quelques amendements seront à préciser, à redéfinir, voire même à combattre, tant leur adoption serait autant de brèches parfois très graves dans la définition et l’exercice de notre métier.

Une Éducation Nationale en rupture de légalité

Une première remarque qui me semble un préliminaire essentiel est que l’Éducation Nationale doit être avant tout nationale.
Cela veut dire que lorsqu’un texte est voté, lorsque des dispositions sont prises au niveau national, il n’est pas question qu’un DASEN puisse faire différemment d’un autre DASEN , voire, pire, qu’un IEN puisse faire différemment d’un autre IEN.
Pourquoi ce préalable ?
Parce que sans lui, notre autorité fonctionnelle risque de n’avoir aucun sens, à l’image des deux dernières mesures prises en aout 2020 et si différemment appliquées : la responsabilité de la direction d’école pour les 108h, et les référents directeurs.

Il n’est pas acceptable qu’un directeur académique au titre de sa fonction puisse décréter une interprétation des textes nationaux différente de ce qu’un autre département appliquera.
Cette rupture d’égalité est en fait une rupture de légalité.
C’est contraire à l’État de droit, contraire au principe même du fonctionnement de ce qu’est un fonctionnaire d’État.
Or plusieurs amendements renforcent ou encouragent ce pouvoir local existant de fait et intimement dépendant de la personnalité du DASEN…
Au titre de la nouvelle Proposition de Loi, que dire du “dialogue tous les deux ans avec l’inspection académique" [la DSDEN] que la loi instaurerait pour les directeurs quant aux missions confiées ?
Quelle garantie d’un DASEN à l’autre face à cet amendement très surprenant rajouté par les sénateurs “avant le 30 juin, l’autorité compétente rend compte de l’utilisation effective lors de l’année scolaire en cours des décharges d’enseignement et de leurs motifs pour exercice de l’emploi de direction des écoles maternelles et élémentaires“ ?
Quelle belle ouverture à la justification de la diminution des décharges par voie autoritaire locale !!!
Sans compter de nouvelles enquêtes chronophages et trompeuses…
Un statut, oui, mais devoir justifier tous les ans le temps passé aux missions de notre fonction ? Cet amendement doit disparaitre…

Par ailleurs, comment sera définie la formation “certifiante“ ? Nous voyons aujourd’hui les différences extrêmes d’un département à l’autre dans les injonctions durant la formation, parfois même contraires au Code de l’Éducation… Les modules de formations sont un enjeu très fort et aiguiseront notre vigilance.
Non, un DASEN et moins encore un IEN ne peuvent décider d’une autre organisation que celle prévue dans nos textes nationaux, de nos relations avec les élus municipaux jusqu’au quotidien de nos écoles.
Il serait bon que la loi le rappelle afin que notre autorité fonctionnelle ne soit pas fonction du département d’exercice…

2 métiers, avant et après la décharge totale ?

Nous sommes tous d’accord que l’école publique en France est plurielle.
45 000 écoles, et probablement plus de 1000, 5000 10 000 cas différents.
Pour autant, et même à considérer qu’une école à deux classes n’est évidemment pas la même chose qu’une école à 14 classes ou plus, pourquoi instaurer soudainement dans la loi cette différence “certifiante“ pour les directeurs et directrice d’école entièrement déchargés versus les autres ?

Y aurait-il alors deux types de directions d’école ? Mais alors, ce fameux statut serait défini pour qui, quel type d’école ? Y aurait-il deux métiers différents selon le nombre de classes, nonobstant le fait que nombre d’écoles à 12 classes ont plus d’élèves et de familles que d’autres écoles à 14 classes aujourd’hui ?
Quel fonctionnement administratif autour de cette dichotomie soudainement apparue ? Un(e) directeur(trice) d’école à 11 classes ne pourrait pas demander une école à 14 classes sans repasser un entretien "certifiant“ ? Si je suis dans une école qui passe à la rentrée en nombre de classes permettant la décharge totale, et que je veux conserver ma direction d’école il me faudrait aussi suivre une “formation certifiante“ ? Pourrais-je perdre cette certification dans le cas contraire de mon école perdant une classe ?
Nous aurions donc 2 métiers là où nous revendiquons un seul métier pour une seule autorité fonctionnelle et un seul statut ???

Quid de la liste d’aptitude et de l’entretien qui y est aujourd’hui rattaché ? Quid des conditions “fixées en Conseil d’État“, et pourquoi en Conseil d’État (ce qui pourrait apparaître comme une sécurité risque fort d’être dans les faits un frein réel) ?
La seule phrase qui doit perdurer après "[…] et ayant suivi une formation à la fonction de directeur d’école" est « Cette formation, complétée lors de la première année d’exercice, est certifiante ». Sans aucune mention à une différenciation selon le taux de décharge ou quelque autre spécificité d’école.
En revanche, que la liste d’aptitude soit organisée nationalement différemment selon le type d’école souhaitée, pour une première nomination, pourquoi pas… Mais pas avec cette différence de certification, et en oubliant définitivement les profils très locaux demandés parfois… Notre grande maison est Nationale, rappelons-le…


Des missions complémentaires qui nient la réalité de notre métier

Toujours dans cet article 2, décidément sujet à caution, les sénateurs ont totalement biaisé l’esprit du texte d’origine quant aux “missions de formation ou de coordination“…
Le Projet de Loi d’origine, et issu de l’Assemblée, dans une proposition que nous avions portée puis soutenue, avait intégré la possibilité de confier aux directions d’écoles non entièrement déchargées des missions complémentaires. Ces missions avaient notamment pour effet d’augmenter leur temps de décharge (de diminuer le temps d’enseignement devant élève).
Il ne peut pas être question de charger une directrice ou un directeur entièrement déchargé d’une mission de plus !
Parce qu’entièrement déchargé on a du temps en plus pour faire autre chose que gérer son école ? Et lorsque nous ne sommes pas entièrement déchargés, on pourrait alors augmenter nos missions au risque d’ailleurs de ne pas augmenter notre décharge (cf "bilan d’avant le 30 juin" cité plus haut) ?
Conserver cet amendement serait nier tout l’esprit du travail entamé visant à faire dégager du temps pour la direction d’école !

Ce contre-sens doit impérativement être supprimé en seconde lecture, revenant à notre proposition initiale, pour le respect de notre charge de travail (et pour limiter les différences de traitement entre les DASEN).


Un projet de nouvelle direction d’école qui reste très fragile

On le voit, dans une volonté technocratique ou idéologique de ne pas toujours regarder le réel en face, le législateur sénatorial a cru bon d’intégrer dans ce texte qui aurait dû nous satisfaire quelques éléments qui montrent la plus extrême dangerosité d’une l’idéologie de l’école qui ne la rend toujours pas libre et responsable.

Nombre de sénateurs nous ont entendus, et ont compris la problématique locale des écoles et de leur pilotage. Mais dans la majorité du scrutin sénatorial se sont révélés des obstacles qui pourraient devenir majeurs si nous n’y prenons pas garde…
Partageons et agissons pour que l’Assemblée Nationale, pour sa deuxième lecture, prenne véritablement en compte la dimension de la direction d’école telle que nous l’avons portée et proposée afin qu’elle soit reconnue !
Faute de quoi, outre le gâchis d’une telle modification de l’esprit du projet de loi de Cécile Rilhac et Cathy Racon-Bouzon, notre métier en pâtira durablement et il est un syndicat qui s’en frottera les mains, majoritaire aux élections chez les enseignants mais dont on ne sait pas s’il n’est pas minoritaire en représentation au niveau des directions d’écoles…

Cette loi peut améliorer notre métier, et plus encore le quotidien de toutes les enseignantes et de tous les enseignants.

Si l’avenir de notre statut va probablement être inscrit enfin dans la loi, le chemin qui nous reste à faire n’est pas achevé…
Le combat syndical ami, notre mobilisation associative, de chacune et de chacun, tout doit permettre de renforcer l’esprit de la loi, réparer ce qui doit l’être, élaguer ce qui pique…
Hier encore nous ne savions pas si nous pouvions l’espérer, et le premier pas est fait ! Nous devons toutes et tous nous emparer de cet élan pour tirer cette loi vers le haut !

Marc BURLAT



(*) : www.sgen-cfdt.fr/actu/autorite-fonctionnelle-de-quoi-parle-t-on/