La rencontre au ministère a eu lieu le jeudi 9 mai avec Mme Isabelle Bourhis, conseillère sociale, partenariats et vie scolaire au cabinet de M. le Ministre de l’éducation nationale. Alain Rei, Samuel Auxerre et Pierre Lombard représentaient le GDiD.
Mme Bourhis en préambule a voulu présenter les intentions du Ministre pour concrétiser la priorité au 1er degré : il veut s’appuyer sur la valeur des enseignants, et limiter les effectifs à 24 élèves en GS, CP et CE1 sans augmenter ceux des autres classes.
Le GDiD précise qu’il est nécessaire de s’appuyer sur l’expertise des Directeurs d’école qui sont les seuls à ne pas avoir de statut particulier qui leur permettrait d’incarner institutionnellement l’école.
Mme Bourhis réclame des données et documents précis afin de préparer l’agenda social pour les Directeurs d’école, et demande ce qui est mis en place en place pour l’aide aux Directeurs.
Le GDiD transmet une compilation de rapports et d’enquêtes, ainsi que l’analyse et les propositions du GDiD sur l’indispensable transformation du métier. L’’empilement désordonné des missions et responsabilités que l’Institution nous impose n’est plus supportable. La terminologie même doit changer, il faut passer du « Directeur- enseignant » plus ou moins déchargé de classe à « Directeur » avec éventuellement une charge d’enseignement une fois défalqué le temps indispensable à son métier de Directeur. Le décret de 1989, le référentiel métier, la charte avec les IEN, font du Directeur le collaborateur privilégié de l’IEN, le maillon local de la mise en œuvre des politiques éducatives. Mais dans les faits, il n’en est rien, le Directeur n’est associé à rien, il n’est que le récipiendaire d’injonctions verticales. L’exemple de la mise en place des évaluations CP/CE1 est frappant : alors que les IEN ont eu un séminaire de 3 jours, les Directrices et Directeurs des écoles ont reçu au mieux une courte information, au pire un simple passage de consignes. D’ailleurs pour ce qui concerne l’aide aux Directeurs, s’il existe dans certains départements des « directeurs Vie Scolaire », ces postes ne sont toujours pas généralisés. Quant aux outils nationaux ils sont rarement utilisés. Les Directeurs n’ont clairement pas les moyens (entrée dans le métier, carrière, formation) de se reconnaitre comme des personnels à hautes responsabilités et des responsables reconnus. Les collègues font remonter des situations de moins en moins vivables de gestion de l’école dans leurs trois domaines de compétences : la relation de plus en plus exigeante avec les parents d’élèves, le pilotage et la formation de l’équipe pédagogique et la sécurité.
Mme Bourhis demande un point sur la demande de statut.
Le Président de la République et M. le Ministre de l’éducation nationale mettent en avant la priorité au primaire. Il faut une meilleure reconnaissance du premier degré, et pas seulement des moyens budgétaires, afin de renforcer sa place de proximité importante. Cette priorité ne peut passer que par la création d’un statut pour le Directeur et pour l’école. C’est à partir de la création d’une identité Institutionnelle de l’école que les moyens mis à sa disposition pourront être optimisés. Sans cette horizontalité, les mêmes causes auront les mêmes effets c’est-à-dire une dilution au profit de la bureaucratisation. Le GDiD précise que la plupart des acteurs et partenaires directs de l’école rejette le statu quo et approuve la création d’un statut pour les Directrices et Directeurs d’école : 93% des directeurs mais aussi, la FCPE, la PEP, l’ANDEV, l’AMF, le SGEN-CFDT, le SNE-CSEN, le SE-UNSA et le SIEN-UNSA… Un statut permettrait de reconnaitre la spécificité du métier, statut dont la priorité serait la définition claire des responsabilités, des tâches et des prérogatives afin d’éclaircir certaines situations dont le flou actuel entraine parfois des conflits ou des incohérences. Les moyens nécessaires devraient ensuite être mis en harmonie. Cet ordre des priorités est stratégiquement important.
Mme Bourhis approuve l’énoncé de tous les acteurs de l’école cités, et indique que dans la « boite à outils » du ministère l’EPSF - qui doit encore être discuté - est une solution possible, et que la question des Directeurs est donc ouverte dans l’agenda social en cours.
Le GDiD rappelle que cette solution était la dernière du rapport parlementaire de l’été 2018, alors que le statut du Directeur d’école était la première mise en avant. Si au sein de l’école certaines décisions peuvent être prises dans l’exercice collectif, les responsabilités du Directeur ne peuvent pas légalement se partager, et l’autorité en est un outil indissociable. Les Directrices et Directeurs d’école font partie de la chaine hiérarchique, ils ont une autorité au sein de l’école. Ce statut hiérarchique n’est pas obligatoirement un statut d’évaluateur des enseignants, mais c’est une autorité fonctionnelle. Le statut d’emploi fonctionnel, engagé avec le GrAF en 2014 puis retiré, est une solution efficace adaptée à l’urgence de la situation. Le ministère, en positionnant le Directeur d’école comme tel, permettrait le principe de subsidiarité et installerait une autonomie de terrain qui donnerait corps à son slogan de l’ « école de la confiance ».
Mme Bourhis demande pourquoi l’information ministérielle descend aussi mal aux enseignants du premier degré.
Le GDiD répond que c’est parce que le ministère arrête ses actions managériales au niveau des IEN qui - n’ayant ni le temps ni les contacts de proximité - ne peuvent traiter le personnel des écoles que comme de simples exécutants. Le ministère se prive ainsi de toute la richesse professionnelle des acteurs de terrains qui seuls sont capables d’adapter les instructions aux contingences locales et les rendre efficaces. Il y a une claire inadéquation entre la volonté du législateur qui recherche par les textes l’autonomie des écoles (projet d’écoles, conseil des maitres, conseil d’école, décret de 89, référentiel métier des directeurs d’école… l’école de la confiance !) et le fonctionnement purement vertical du 1er degré. Cette inadéquation explique les faibles résultats français aux enquêtes internationales. Il en est de même pour l’information des problèmes qui sont pointés par les Directeurs mais qui ne remontent pas jusqu’au ministère. En se privant de ce relais pourtant indispensable qu’est le Directeur d’école les mesures perdent de leur consistance, de leur sens et n’ont pas la portée attendue dans les écoles, auprès des enseignants comme des élèves. Là encore l’exemple des évaluations CP/CE1 devrait alerter les décideurs.
En conclusion de la réunion le GDiD indique toutes les avancées et tous les points techniques pouvant ou devant être mis en place le plus rapidement possible pour répondre à la souffrance des Directeurs. Les décisions qui seront prises dans le cadre de l’agenda social seront considérées comme un gage de confiance, un indicateur essentiel de la place que le ministère cherche à donner au 1er degré et de la considération qu’il porte aux acteurs de terrain que sont les Directrices et Directeurs d’école. Le directeur est un fonctionnaire d’autorité de proximité, il doit être reconnu et renforcé par l’Institution pour le sortir de ce paradoxe mortifère : identifié comme le responsable local par les parents et les élus mais complètement nié par l’Institution, le Directeur d’école ne peut qu’être dans la souffrance professionnelle. Le GDiD demande que des mesures urgentes puissent être appliquées dès la rentrée de septembre 2019, seule façon pour le ministère d’avoir l’écoute des Directrices et Directeurs d’école.
Mme Bourhis remercie les trois membres du GDiD présents de tous les arguments et idées exposés qui lui permettront de préparer la suite des réunions avec les organisations syndicales, lors de l’agenda social pour les Directeurs d’école.