mercredi 13 juin 2018

Circulez, y'a rien à voir !

Le gouvernement vient de lancer un "scud", comme on dit, aux Directrices et Directeurs d'école de France. J'avais évoqué en février dernier l'excellente question posée à l'assemblée nationale par M. Houbron. La réponse - au 12 juin quand même, on n'est pas pressé dans les hautes sphères - vaut son pesant de cacahouètes !

Accompagnés par les pipeaux de la DGESCO, M. Blanquer nous interprète l'air du "On vous a déjà beaucoup donné", jolie ritournelle douce-amère qui ne peut leurrer que ceux qui ne connaissent pas notre métier, c'est à dire 99% de la population quand même, y compris nos propres adjoints qui n'ont pour la plupart aucune idée de nos responsabilités. Pour finalement nous asséner - pan dans les dents - que "Dans ces conditions, il n'est pas envisagé ce jour de créer un statut de personnel de direction pour les professeurs des écoles assumant cette mission."

Pire, en écrivant que "pour l'année scolaire 2016-2017, 65% des directeurs d'écoles bénéficiaient de décharges de service (29 828 sur 45 877 écoles publiques)", M. Blanquer veut laisser croire que la majorité d'entre nous sommes concernés et que nous nous tournons les pouces, ce qui est un peu fort de café si je ne regarde que mon propre sort de Directeur chargé de classe à temps plein... avec dix journées remplacées par an qui tombent toujours comme un cheveu sur la soupe (je n'aurai pas charge de classe le 29 juin, quel bonheur!).

Bref, cette réponse éhontée me reste en travers de la gorge. On voudrait me dire d'aller "me faire foutre" qu'on ne le dirait pas autrement. Circulez, y'a rien à voir ! Et puis appeler "mission" ce que moi j'appelle "métier" m'agace au plus haut point.

Si je rapproche ces affirmations ahurissantes du mutisme effarant du ministère face aux demandes d'entretien du GDiD, je ne peux qu'affirmer que jamais depuis quinze ans nous n'avons été aussi ignorés, méprisés, laissés pour compte. Venant d'un ministre qui se répand dans tous les médias pour expliquer sa puissante volonté de réformer l'école, c'est grossier.

D'un autre côté j'éprouve une certaine satisfaction, celle de constater que la tactique du GDiD depuis quelques années est la bonne de considérer que jamais les Directrices et Directeurs d'école n'obtiendront de statut en dehors de la création des "établissements du 1er degré" dans une logique territoriale. Nous avons été rejoints sur ce chemin par le SGEN-cfdt et semble-t-il le SE-unsa, mais il y a peut-être encore quelques syndicats ou collègues qui s'illusionnent, et si cette réponse abrupte pouvait les amener à l'illumination ce serait une bonne chose.

Maintenant je ferai partie des abandonnés. Je n'imagine pas dans les temps proches que ma petite maternelle puisse être regroupée si facilement que ça avec d'autres, ce qui signifie qu'une fois lancée la machine je resterai un petit Directeur esseulé sans aide ni soutien. Enfin, mon successeur plutôt, je ne vais pas tarder à prendre mon envol vers des cieux moins perturbés, et après quarante années d'abnégation je ne regretterai rien. Néanmoins la question restera posée des Directrices et Directeurs d'école qui ne seront pas chefs d'établissement du 1er degré pour cause de petitesse. Il va bien falloir tout de même inventer quelque chose pour nous. Non ? Ah...

En attendant j'ai du mal à avaler cette réponse monstrueuse à la question de M. Houbron, comme j'ai du mal à avaler pour le GDiD la fin de non-recevoir du ministère. J'aimerais beaucoup que les Directeurs d'école de France puissent monter une opération spectaculaire qui enquiquinerait le ministère sans embêter nos élèves ni les familles, qui ne poserait pas de problème de gestion comme la longue et pseudo-grève administrative des Directeurs d'il y a quinze ans, mais qui serait tout de même hyper-visible du public... Mais quoi ? Quelle action ? Je me creuse la tête depuis des années et ne vois rien. Alors si vous avez des idées - je veux dire des "bonnes" idées - ...

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